Les Bonnes est une pièce de théâtre écrite après la fin de la Seconde Guerre mondiale par Jean Genet. À la fois poète, écrivain et dramaturge (auteur de pièces de théâtre), Jean Genet est principalement connu pour avoir écrit sur des sujets délicats, comme l’érotisme ou l’homosexualité.
La pièce appartient au théâtre de l’absurde. Il s’agit d’un courant littéraire datant du XXe siècle. Il est révélateur de nombreux bouleversements engendrant ainsi des histoires décousues, des conversations absurdes entre les personnages et une continuité du discours hachée.
La pièce représente en quelque sorte une parodie de la tragédie classique. À travers cette œuvre, l’auteur critique la bourgeoisie du XXe siècle.
Une adaptation cinématographique réalisée par Nikos Papatakis a vu le jour en 1963. Le titre choisi pour cette adaptation est Les abysses.
Cette pièce de théâtre a suscité la réalisation de deux films qui s’en sont plus ou moins inspiré. C’est le cas du film La cérémonie (réalisé par Claude Chabrol en 1995) et Les blessures assassines (réalisé par Jean-Pierre Denis en 2000). Ce dernier film s’inspire également du fait-divers des sœurs Papin, dont Les Bonnes conserverait quelques similitudes au niveau des personnages et des circonstances du drame. Toutefois, Jean Genet persiste à affirmer que l’affaire Papin n’est pas la source de son inspiration (l’affaire Papin relate un fait-divers survenu en 1933 au Mans, où deux employées de maison ont froidement tué leurs patronnes).
Claire Lemercier : Elle est la sœur cadette de Solange Lemercier. Elle possède un fort caractère et se montre souvent révoltée. Madame : C’est la patronne de Claire et Solange. Elle a failli être empoisonnée par les deux sœurs, mais elle n’a pas bu l’infusion au tilleul contenant le fameux poison et c’est ainsi qu’elle a pu échapper de justesse à la mort. Monsieur : C’est le mari de Madame. Solange Lemercier : C’est la sœur aînée de Claire Lemercier. Au contraire de sa sœur, elle est timide et se comporte avec une grande douceur. Solange et sa sœur Claire travaillent toutes deux pour Madame.
Le malaise : L’auteur a mis en place plusieurs stratégies afin de faire passer une sensation de malaise. Qu’il s’agisse du texte lui-même ou de la pièce jouée, le lecteur et le spectateur se sentent a priori gênés, perturbés, notamment par cet échange constant d’identités. Nous pouvons supposer que Jean Genet fait référence à la bourgeoisie lorsque les personnages échangent leur place : quoi de plus provocateur que de faire jouer à une employée de maison le rôle d’une patronne, bourgeoise qui plus est ? L’identité personnelle : La question de l’identité propre à chaque individu est essentielle dans cette pièce de théâtre. En effet, le lecteur constate très rapidement que Claire et Solange se mettent à la place de leur patronne Madame. Voici un extrait qui illustre cet échange de rôles :
« CLAIRE :
Disposez mes toilettes. La robe blanche pailletée. L’éventail, les émeraudes. »
« SOLANGE :
Tous les bijoux de Madame ? »
« CLAIRE :
Sortez-les. Je veux choisir. (Avec beaucoup d’hypocrisie). Et naturellement les souliers vernis. Ceux que vous convoitez depuis des années. »
La bourgeoisie : La bourgeoisie est une classe sociale reconnue comme « privilégiée » en raison d’une situation financière et sociale aisée.
Jean Genet se sert de sa pièce comme d’un instrument de critique de la bourgeoisie du XXe siècle.
Deux sœurs (Claire et Solange) travaillent pour une femme du nom de Madame. Claire est résolument révoltée et dynamique, tandis que Solange est plutôt calme et timide. Malgré les années qui unissent ce trio particulier, les deux sœurs essaient de tuer leur patronne. Pour ce faire, elles introduisent du poison dans une infusion au tilleul. Madame ne boit pas le futur mélange mortel et déjoue ainsi sans le savoir le plan macabre de ses employées de maison.
Le mari de Madame, nommé Monsieur, est en prison. En prévision de sa sortie prochaine, Madame s’offre une nouvelle garde-robe, parmi laquelle de nombreux chapeaux et robes.
Les personnages de la pièce échangent leur place au fur et à mesure du déroulement de l’histoire. La fin tourne au tragique : Claire joue le rôle de Madame et boit l’infusion au tilleul contenant le poison. Elle meurt donc à la place de Madame.
« Je vous ai dit, Claire, d’éviter les crachats. Qu’ils dorment en vous, ma fille, qu’ils y croupissent. Ah ! ah ! vous êtes hideuse, ma belle. Penchez-vous davantage et vous regardez dans mes souliers. (Elle tend son pied que Solange examine). Pensez-vous qu’il me soit agréable de me savoir le pied enveloppé par les voiles de votre salive ? Par la brume de vos marécages ? »« CLAIRE :
Je dis frôleuse. Si vous tenez à pleurnicher, que ce soit dans votre mansarde. Je n’accepte ici, dans ma chambre, que des larmes nobles. Le bas de ma robe, certain jour, en sera constellé, mais de larmes précieuses. Disposez la traîne, traînée ! »
« SOLANGE :
Je vous hais ! Je vous méprise. Vous ne m’intimidez plus. Réveillez le souvenir de votre amant, qu’il vous protège. Je vous hais ! Je hais votre poitrine pleine de souffles embaumés. Votre poitrine… d’ivoire ! Vos cuisses… d’or ! Vos pieds… d’ambre ! (Elle crache sur la robe rouge). Je vous hais ! »
« SOLANGE, dure :
Surveille la fenêtre. Grâce à ta maladresse, rien ne serait à sa place. Et il faut que je nettoie la robe de Madame. (Elle regarde sa sœur). Qu’est-ce que tu as ? Tu peux te ressembler, maintenant. Reprends ton visage. Allons, Claire, redeviens ma sœur… »