Le XIXe siècle est marqué par de grandes avancées autour de la réflexion sur l’évolution. On note par exemple Darwin qui publie en 1859 son célèbre De l’origine des espèces. Plusieurs théories autour de l’évolution fleurissent. Bergson s’inscrit dans la continuité de cette réflexion sur l’évolution en proposant en 1907 L’Évolution créatrice : il lie dans son ouvrage la vie et l’intuition, la matière et l’intelligence.
Bergson tente de situer l’homme dans l’évolution. Pour lui, toutes les espèces sont dotées d’une conscience. C’est l’intelligence qui distingue l’homme des autres espèces, par sa capacité de réflexion et de fabrication, et qui rend possible sa liberté. L’intelligence est destinée à assurer l’insertion parfaite de notre corps dans son milieu, pour interagir avec les choses extérieures, avec la matière.
Sa vision de l’évolution s’oppose à une forme de mécanisme qui dit que l’évolution est un processus hasardeux, imprévisible, sans aucune intention ou volonté. Il rejette aussi l’idée que l’évolution est planifiée : il oppose à ces thèses le concept d’élan vital. Pour lui, la vie est un ensemble de forces psychiques qui agissent sur la matière. Le comportement des êtres vivants a des causes psychologiques, qui diffèrent selon les différents degrés de conscience (qui sont différents chez les animaux et les hommes).
L’évolution des espèces est due à des mutations au niveau des cellules. Pour lui, ces mutations ne sont pas accidentelles, elles ont un sens et des causes psychologiques. L’origine de ces causes psychologiques est une unique force psychique : l’élan vital, qui se divise au fil des différentes générations. C’est donc une tendance créatrice de la vie, qui assure la continuité de l’espèce et engendre l’évolution des êtres.
Cependant, notre pensée est incapable de se représenter la vraie nature de la vie, sa signification profonde. Car elle n’est qu’une émanation de cette vie, qu’un aspect, comment pourrait-elle donc appréhender la vie dans sa totalité ? L’intelligence est donc incapable d’appréhender cette durée, le mouvement indivisible de toute vie. Pour connaître ce mouvement, la vie et la durée, il fait appel à l’intuition. Il la définit comme « la sympathie intellectuelle ou spirituelle par laquelle on se transporte à l’intérieur d’un être pour coïncider avec ce qu’il a d’unique et par conséquent d’inexprimable ». C’est-à-dire, la compréhension immédiate par l’esprit de lui-même, au sein de la durée.
« L’intelligence est caractérisée par une incompréhension naturelle de la vie. »