Joachim du Bellay est encore étudiant au collège Conqueret de Paris lorsqu’il rédige cette lettre. Dans ce prestigieux établissement, il fait la rencontre de Jean Dorat, professeur émérite de latin, qui va avoir une grande influence sur lui. Du Bellay fondera alors avec lui un groupe de poètes, baptisé la Brigade, dont l’objectif est de donner ses lettres de noblesse aux français. Ils seront rejoints par Jacques Peletier du Mans. Le texte sera donc un manifeste de la Brigade, devenue la Pléiade (référence à un groupe de poètes grecs anciens), manifeste qui exprimera l’intérêt que porte le groupe à la langue française et à l’usage que l’on doit en faire. Dix ans avant l’ordonnance de Villers-Cotterêts, qui officialisera le français comme langue du droit et de l’administration du Royaume, cette attitude est avant-gardiste.
Il faut savoir qu’à cette époque, le français n’est pas encore la langue officielle du royaume mais un dialecte parmi d’autres. La réputation de cette langue est même plutôt mauvaise, comparée au latin ou au grec, qui sont considérés comme les plus nobles des langages, dès lors que l’on veut enseigner ou administrer. Elle est réservée au bas-peuple, empreinte de barbarisme et de vulgarité pour les puissants. Mais cette lettre va mettre en branle un processus de remise en question.
L’héritage antique : Un des arguments de Du Bellay était que les Grecs et les Romains étaient de grands hommes au travers de l’emploi immodéré qu’ils faisaient de leurs langues. Rome s’est bâtie sur les ruines grecques et la France doit reposer sur les fondations laissées par ses illustres modèles. Langue et culture : La langue et son usage sont le reflet et la matrice d’une culture. Si le Royaume de France veut se doter d’une culture forte, il doit brandir sa langue « vulgaire » comme un étendard et la porter aux nues. La poésie, outil merveilleux : La poésie est l’outil qui permettra aux français de digérer ses anciennes influences pour devenir une entité unique. Les spécificités de la langue sont toujours mises en avant par la poésie, les périphrases et toutes les autres figures de style doivent servir ce but ultime. Contestation des dérives de son époque : En fondateur de la Pléiade, Du Bellay se doit de critiquer ses contemporains, et il ne s’en prive pas. Pour lui, ils n’emploient pas le formidable legs gréco-romain à bon escient et se réfugient dans une posture élitiste et vaine.
La lettre est un long texte découpé en deux livres, pour un total de 24 chapitres.
Le premier livre expose la vision de l’auteur sur la langue française et vise à faire comprendre ses objectifs et sa vision.
Le second livre est plus concret, il recense tous les moyens d’action visant à enrichir le français, essentiellement, la poésie.
LIVRE 1
LIVRE 1
Chapitre I
Chapitre I
Le premier chapitre évoque l’origine et le développement des langues. Il y est question du caractère profondément arbitraire et humain de l’évolution d’une langue. Cela signifie que l’on peut exercer un contrôle là dessus.
Chapitre II
Chapitre II
Le second chapitre détaille l’origine du mot « barbare » et son utilisation dans l’histoire, en racontant l’emploi que les Grecs faisaient de ce terme péjoratif pour désigner les étrangers et leur façon de parler. L’auteur met en avant le fait que les Romains ont repris cette attitude péjorative.
Chapitre III
Chapitre III
Il est ici question de la richesse de la langue. On reproche au français d’être moins riche que le grec et le latin, ce qui est logique, puisque cette langue a été négligée au profit des deux autres, créant ainsi un cercle vicieux.
Chapitre IV
Chapitre IV
En lien avec le précédent chapitre, du Bellay remet en cause la pauvreté supposée da la langue française. Pour lui, elle a le potentiel de devenir riche et noble, pour peu que l’on s’emploie à l’utiliser à de grands ouvrages. Les traductions et l’emploi de cette langue par des peuples étrangers sont utilisés comme arguments.
Chapitres V et VI
Chapitres V et VI
Dans les deux chapitres suivants, la traduction est étudiée plus avant. Elle est considérée comme insuffisante à faire évoluer la langue française. Il s’agit donc de faire jeu égal avec les illustres Anciens en donnant au vulgaire des chefs-d’œuvre aussi importants que L’Odyssée par exemple. Il parle aussi des mauvais traducteurs, qui détournent d’anciens textes pour leur gloire personnelle et du fait que les poètes sont aussi peu avisés qu’eux pour ce travail particulier.
Chapitres VII et VIII
Chapitres VII et VIII
Il y est question d’enrichissement de la langue par l’imitation. Il s’agit de bien digérer l’influence des Anciens et de s’inspirer de leur attitude quant à leur propre langage. Du Bellay montre que les Romains ont imité les Grecs, il faut donc faire de même pour enrichir le français.
Chapitre IX
Chapitre IX
L’auteur répond ici aux naturelles objections qui émergent quant à son projet. Le fait que le français ne fonctionne pas comme les langues antiques, qu’il n’en a pas les mêmes sonorités et encore moins la même longévité. Il balaie systématiquement tous ces arguments.
Chapitres X et XI
Chapitres X et XI
Au chapitre X, Du Bellay met en avant l’écrit, plus que l’oral, le fait que chaque langue soit à égalité avec les autres, d’où la nécessité de les apprendre et de découvrir les trésors qu’elles recèlent. Les Anciens étaient savants précisément parce qu’ils ne négligeaient ni leur langage propre, ni celui de leurs voisins.
Chapitre XII
Chapitre XII
Dans sa conclusion du premier livre, l’auteur convoque le fantôme de Cicéron pour étayer son propos. Pour lui, il convient d’imiter et de s’inspirer des grands auteurs antiques pour parvenir à les égaler.
LIVRE 2
LIVRE 2
Chapitres I et II
Chapitres I et II
Du Bellay évoque l’importance de la poésie dans l’élévation d’une langue. Il évoque alors plusieurs poètes contemporains, pour les critiquer et montrer qu’ils ne sont pas dignes de leurs prédécesseurs. Du Bellay et sa Pléiade y remédieront.
Chapitre III
Chapitre III
La poésie est présentée comme un sacerdoce, et non pas une activité courtisane. Il s’agit d’un art exigeant, qui demande beaucoup de celui qui le pratique, si ce dernier veut accéder à la postérité.
Chapitres IV et V
Chapitres IV et V
Dans ces lignes, Du Bellay offre ses conseils quant aux formes poétiques à observer. La tragédie, la comédie et les odes sont les plus nobles et dignes d’être pratiquées.
Chapitre VI
Chapitre VI
La création de néologismes et le travail de recherche sur des termes purement français sont évoqués comme des outils indispensables du poète.
Chapitres VII et VIII
Chapitres VII et VIII
Les rimes, leurs origines et leur rôle sont expliqués dans ces deux chapitres. On évoque l’héritage grec et romain sur la poésie contemporaine. Il est aussi question de l’emploi que l’on peut faire des vers non rimés, qui se doivent d’être remarquables pour compenser cette spécificité.
Chapitre IX
Chapitre IX
Dans cette partie, Du Bellay met en avant certaines particularités du français, notamment les périphrases et les épithètes, outils d’enrichissement de la langue.
Chapitre X
Chapitre X
Il est ici question de la manière de prononcer les vers et les rimes.
Chapitre XI
Chapitre XI
Il y est question de certains procédés à employer, détaillés dans les écrits d’Horace et des défauts des poètes modernes.
Chapitre XII
Chapitre XII
Du Bellay exhorte une dernière fois les Français à pratiquer leur langue pour l’élever au niveau des antiques. Il évoque une longue route, qu’ont déjà entreprise certains érudits contemporains.
Conclusion
Conclusion
Du Bellay évoque le pillage des savoirs et arts anciens nécessaire à l’établissement d’une culture et d’une langue françaises fortes.
« Ne pensez donc, quelque diligence et industrie que vous puissiez mettre en cet endroit, faire tant que notre langue, encore rampante à terre, puisse hausser la tête et s’élever sur pieds. »
Chapitre VII, Livre I « […] le Français et l’Allemand, non seulement le Grec ou Romain, se peut donner à philosopher : aussi je crois qu’à chacun sa langue puisse compétemment communiquer toute doctrine. »
Chapitre X, Livre I « […] C’est la gloire, seule échelle par les degrés de laquelle les mortels d’un pied léger montent au ciel et se font compagnons des dieux. »
Chapitre IV, Livre II « Là donc, Français, marchez courageusement vers cette superbe cité romaine : et des serves dépouilles d’elle (comme vous avez fait plus d’une fois) ornez vos temples et autels. »
Conclusion