Après la querelle du Cid, Corneille tient compte des critiques de l’Académie et écrit Cinna, une tragédie romaine rigoureusement conforme aux règles et aux bienséances. Il y accorde une place capitale aux affaires d’État, conformément à sa conception de la tragédie (Premier discours sur le poème dramatique) : « [L]a dignité [de l’action tragique] demande quelque grand intérêt d’État, quelque passion plus noble et plus mâle que l’amour, telles que sont l’ambition ou la vengeance, et veut donner à craindre que des malheur plus grands que la perte d’une maîtresse. »
Auguste : Auguste est l’empereur de Rome. Livie : Livie est l’épouse d’Auguste. Elle est donc l’impératrice. Émilie : Émilie veut venger son père Toranius, tué par Auguste. Cinna : Cinna, amant d’Émilie, organise la conjuration contre Auguste. Maxime : Maxime, ami de Cinna, est l’autre chef de la conjuration. Euphorbe : Euphorbe est l’affranchi de Maxime. Fulvie : Fulvie est la confidente d’Émilie.
Une tragédie politique : Cinna illustre une conception noble et grandiose du pouvoir, celle d’Auguste. Maîtrise de soi, lucidité, aspiration à la grandeur, justice sereine, clémence : telles sont les vertus d’un empereur. L’amour : L’amour n’occupe pas la même place que dans la tragédie racinienne, et n’y joue pas le même rôle. « Il faut qu’il se contente du second rang », laissant le premier au « devoir de la naissance » et à une passion jugée plus noble, la vengeance. Le héros cornélien : Chez Corneille, le conflit tragique oppose « l’impétuosité des passions aux lois du devoir et aux tendresses du sang ». Ainsi, Auguste est partagé entre son désir de vengeance et la clémence, devoir d’un souverain. Et c’est le devoir qui l’emporte, grâce à la grande maîtrise de soi dont le héros fait preuve : « Je suis maître de moi comme de l’univers » (Acte V, scène 3), affirme Auguste.
Cinna met en scène une conspiration manquée traversée par une intrigue amoureuse. Un complot se trame contre l’empereur Auguste. La conjuration regroupe sa fille adoptive, Émilie, qui veut venger l’assassinat de son père, ainsi que Cinna et Maxime, des proches d’Auguste qui agissent par amour pour Émilie et par haine de la tyrannie. La conspiration est découverte, mais celui qui aurait dû en être victime, au lieu de se venger, pardonne et donne son approbation au mariage entre Cinna et Émilie, se réalisant ainsi dans la maîtrise de soi et la générosité.
Acte I
Acte I
Avant d’être empereur, Auguste a fait assassiner, pour des raisons politiques, le père d’Émilie. Bien que cette dernière soit choyée par l’empereur, elle veut venger son père. Elle a promis d’épouser Cinna, son amant, s’il tue Auguste. Cinna organise donc une conspiration avec son ami Maxime.
Acte II
Acte II
Auguste, lassé du pouvoir, demande leur avis à Cinna et Maxime, dont il ignore le projet. Cinna lui conseille de ne pas abdiquer, craignant que ses crimes restent impunis.
Acte III
Acte III
Maxime apprend que Cinna aime Émilie, alors qu’il l’aime aussi. Il doit alors résister à la tentation de trahir son ami. Quant à Cinna, touché par les confidences d’Auguste, il n’est plus déterminé à le tuer. Face à l’insistance d’Émilie, il s’y résigne mais menace de se suicider une fois le meurtre accompli.
Acte IV
Acte IV
L’empereur est informé du complot par Euphorbe, l’affranchi de Maxime. Émilie l’apprend par Maxime qui lui déclare son amour. Elle le repousse.
Acte V
Acte V
Cinna, convoqué par Auguste, est rejoint par Émilie. Tous deux assument respectivement la responsabilité de la conjuration et se disent prêts à mourir. Puis c’est Maxime qui vient s’accuser de trahison vis-à-vis de tous. Malgré sa peine, Auguste gracie les conjurés dont la haine fait place à la reconnaissance.
« ÉMILIE
Plus le péril est grand, plus doux en est le fruit ;
La vertu nous y jette, et la gloire le suit. »
Acte I, scène 2
Auguste s’adressant à lui-même :
« AUGUSTE
Rentre en toi-même, Octave, et cesse de te plaindre.
Quoi ! tu veux qu’on t’épargne, et n’as rien épargné ! »
Acte IV, scène 2
« ÉMILIE
La gloire et le plaisir, la honte et les tourments,
Tout doit être commun entre de vrais amants. »
Acte V, scène 2
« AUGUSTE
Je suis maître de moi comme de l’univers »
Acte V, scène 3
« ÉMILIE
Ma haine va mourir, que j’ai crue immortelle. »
Acte V, scène 3