- Si la IIIe République instaure une certaine stabilité politique française, par rapport aux échecs des deux premières, les dernières années du régime laissent une France en proie à de nombreux bouleversements. En effet, l’euphorie de l’après-guerre s’est dissipée, et avec elle ses espoirs.
- La crise économique de 1929 qui plonge les États-Unis dans la Grande Dépression – suite au krach boursier – frappe la France au début des années 1930 et s’installe durablement, favorisant dès lors les conflits sociaux et la montée des extrêmes.
- Les gouvernements, très nombreux, se succèdent, sans trouver de véritable solution. Camille Chautemps, un radical socialiste appelé par le président de la République Albert Brun, tient la présidence du Conseil.
L’affaire se déroule à la fin de la IIIe République, entre 1931 et 1934. Alexandre Stavisky, dit le beau Sacha, connu pour des faits d’escroquerie, fait émettre par le Crédit Municipal de Bayonne, avec la complicité du maire Dominique Joseph Garat, un radical socialiste, des bons de caisse à intérêt gagés d’un montant de 235 millions, quand à peine 10 % du montant sont couverts.
L’affaire est révélée grâce à un contrôle du ministère des finances qui signe l’arrestation du directeur du Crédit Municipal de Bayonne, Gustave Tissier, le 23 décembre 1933. L’escroc mondain, qui n’a pas hésité à « arroser » la police, la presse, la justice et les milieux politiques, pense assurer ses arrières. Ainsi le juge Pressard, qui n’est autre que le beau-frère de Chautemps, fait reporter presqu’une vingtaine de fois son procès. Le préfet de Paris, Jean Chiappe, est soupçonné d’avoir freiné l’instruction. Albert Prince, magistrat opiniâtre qui instruit l’affaire, est assassiné alors qu’il devait remettre ses conclusions au garde des Sceaux Henri Chéron, lequel démissionnera quelques temps plus tard.
C’est toute une classe politicienne qui se trouve éclaboussée par le scandale (Dalimier, Bonnaure, Chautemps, etc.). Stavisky se retranche dans son chalet de Chamonix, mais la police, aux abois, le traque. Pris au piège, l’escroc notoire se donne « officiellement » la mort, le 8 janvier 1934, en se tirant une balle dans la tête. Pas dupe, la presse unanime crie à l’assassinat, et de titrer « On a suicidé Stavisky ! » ou « Stavisky s’est suicidé d’une balle à trois mètres. Ce que c’est que d’avoir le bras long ! ».
L’affaire Stavisky connaît un retentissement majeur et signe l’un des tournants de la vie politique française. En effet, elle engendre, début février 1934, une série de manifestions insurrectionnelles, dignes de la Commune, regroupant les ligues d’extrême droite, Action française, les Croix de feu et quelques communistes sous la banderole « À bas les voleurs » (6 février 1934), rejetant le parlementarisme en vigueur. Elles signent tour à tour la démission de Camille Chautemps et celle de son successeur, Édouard Daladier. Face à ce qu’elle considère comme une tentative de coup d’État fasciste, la gauche décide de s’unir pour la première fois, et donnera naissance au Front populaire. Vainqueur des élections de 1936, ce mouvement bouleversera le paysage politique français, notamment par ses réformes sociales.