Une diversité croissante des espaces de production dans le monde
Introduction :
Un espace productif est un espace aménagé et mis en valeur dans le cadre d’une activité économique agricole, industrielle ou de services. Avec le phénomène de la mondialisation, l’organisation des espaces productifs se voit être bouleversée.
Mais en quoi les espaces productifs sont-ils aujourd’hui plus variés et plus nombreux dans le monde ?
Pour répondre à cette question, nous verrons tout d’abord la situation des espaces productifs dans les pays développés, entre crise et mutation, puis nous étudierons le cas des pays émergents, qui voient leurs espaces tournés vers l’exportation. Enfin, nous nous pencherons sur les nouveaux espaces productifs dans les autres pays en développement.
Dans les pays développés : des espaces productifs entre mutation et crise
Dans les pays développés : des espaces productifs entre mutation et crise
Les mutations des anciens espaces productifs
Les mutations des anciens espaces productifs
Mutation :
Changement économique et social de grande ampleur qui s’accompagne de modifications profondes des structures.
Dans les espaces productifs agricoles, les surfaces des exploitations ont en général augmenté. Les grands propriétaires ou les entreprises multinationales ont regroupé des parcelles ; c’est notamment le cas aux États-Unis. Les petites exploitations ont du mal à subsister.
À la suite des délocalisations, des espaces productifs anciens se sont trouvés en situation de crise profonde : les « pays noirs » et anciens bastions industriels ont connu des fermetures d’usines ou de lieux de productions de services, entraînant notamment une hausse du chômage. Des villes, des régions entières se sont trouvées sinistrées.
- Par exemple : la ville de Détroit aux États-Unis, bastion de l’automobile, et plus largement la région des Grands lacs nord-américains, le Nord de la France, l’Est de l’Allemagne, etc.
Délocalisation :
Transfert d’activités, de capitaux et d’emplois d’une entreprise dans un autre lieu afin de bénéficier de conditions économiques plus favorables.
Certains de ces espaces ont néanmoins su se transformer et accueillir de nouvelles activités en remplacement de celles qui avaient disparu. Dans les anciennes usines, des bureaux, des musées, des commerces, des entreprises tournées vers la recherche ou la haute technologie ont vu le jour.
- C’est le cas, par exemple, du Tate Modern Museum à Londres, construit dans une centrale électrique désaffectée.
Le Tate Modern Museum, à Londres © Michal Louč
Les nouvelles dynamiques des espaces productifs
Les nouvelles dynamiques des espaces productifs
Les pays développés ont abandonné la production d’une grande partie des produits à faible valeur ajoutée. Ils se concentrent aujourd’hui sur des activités spécialisées (l’agro-alimentaire, les produits de luxe), parfois associées à des SPL (Systèmes productifs locaux), comme pour la chaussure, la mode ou l’ameublement en Italie.
Système productif local (SPL) :
Concentration, sur un territoire géographiquement délimité, d'unités productives de type PME-PMI, spécialisées dans un secteur d'activité, autour d'un métier ou d'un type de produit.
La France a, quant à elle, développé les pôles de compétitivité comme la Cosmetic Valley dans le Val-de-Loire. D’autres industries stratégiques, telles que l’automobile, l’aéronautique ou l’aérospatiale, restent contrôlées par les pays d’origine, même si la sous-traitance peut être confiée à des entreprises à l’étranger.
- Par exemple, Airbus fait fabriquer une partie de ses pièces au Maroc ; le canadien Bombardier a établi des sites de production au Mexique.
Mais pour les produits à faible valeur ajoutée, on a assisté à des délocalisations en masse. Celles-ci consistent à abandonner une activité de production nationale et à la transférer vers une unité de production à l’étranger, que ce soit pour la réimporter ensuite dans le pays d’origine ou pour l’exporter vers le reste du monde. Après la Seconde Guerre mondiale, ce sont surtout le Japon ou les « quatre dragons » (aussi appelés NPIA pour Nouveaux pays industrialisés d’Asie) qui en ont profité.
Dragons / NPIA (Nouveaux pays industrialisés d’Asie) :
Corée du Sud, Taïwan, Hong Kong et Singapour, pays qui se sont industrialisés et développés rapidement à partir des années 1960 sur le modèle du Japon.
Plus récemment (depuis les années 1980), la Chine, le Mexique et l’Asie du Sud ont accueilli des délocalisations. En Europe, un mouvement de délocalisations a bénéficié à l’Europe de l’Est (Roumanie, Pologne), à la Turquie ou au Maghreb.
Dans les pays développés, de nouveaux espaces sont créés dans des espaces ruraux proches des villes comme les technopôles ou pôles de l’innovation.
- Outre la Silicon Valley, on peut citer Tsukuba au Japon, Sophia-Antipolis et Saclay en France ou Bangalore en Inde.
Les espaces de services se sont concentrés dans les métropoles. Plus celles-ci sont importantes, plus la gamme de services offerts est grande.
- Par exemple, dans le domaine de la santé, les grands hôpitaux et les spécialistes médicaux se retrouvent souvent dans les grandes villes.
La concentration des services dans les métropoles pose le problème de la désertification de certains territoires dont les services de base ne sont plus assurés.
Dans les pays émergents : des espaces productifs tournés vers l’exportation
Dans les pays émergents : des espaces productifs tournés vers l’exportation
Le modèle chinois
Le modèle chinois
La Chine est un grand pays agricole.
- Elle nourrit 20,5 % de la population mondiale sur 9 % de sa superficie.
- La Chine est l’un des premiers pays producteurs agricoles au monde : 1er producteur de blé, 2e de maïs, 1er de porc (un porc sur deux au monde est chinois).
- Néanmoins, l’agriculture chinoise est double. Elle est encore majoritairement constituée de très petites exploitations familiales (taille moyenne : 0,5 hectare) et d’unités de transformation nombreuses et peu modernisées, même si de très grandes structures (fermes de 10 000 vaches) et d’importants groupes agro-alimentaires chinois se développent.
- Le gouvernement chinois distribue des aides publiques pour moderniser le secteur.
En Chine, des espaces productifs nouveaux sont apparus avec l’ouverture du pays après la période maoïste, dans les années 1980. Les investissements étrangers ont ainsi participé activement à la croissance économique du pays.
En Chine, ces espaces ont d’abord été créés sur le littoral dans les ZES (zones économiques spéciales). Dans ce pays, la croissance a été soutenue par l’industrie textile dans un premier temps, puis électrique, mécanique et aujourd’hui électronique. Aujourd’hui, de très grandes firmes chinoises rivalisent avec les multinationales.
- Par exemple, Huawei, qui fabrique des smatphones à Shanghai et Shenzen, qui talonne Samsung et Apple. Le fabricant taïwanais Foxconn assemble les smartphones, tablettes et ordinateurs du géant américain Apple, dans des usines géantes pouvant rassembler plusieurs dizaines de milliers d’ouvriers et ouvrières.
Aujourd’hui, l’augmentation du coût du travail en Chine conduit les entreprises multinationales étrangères et chinoises à délocaliser, à leur tour, leur production dans des pays où le coût de la main-d’œuvre est moindre (Vietnam, Laos, Bangladesh, etc.).
Dans le secteur des services, la Chine rattrape très rapidement son retard sur les pays développés : de grandes banques (Agricultural Bank of China), des assurances (Anbang Insurance Group) ou des entreprises de e-commerce (Alibaba) sont aujourd’hui classées parmi les premières entreprises multinationales de la planète.
Les autres pays émergents
Les autres pays émergents
- Le Brésil :
- est devenu la « ferme du monde » grâce à ses exportations de produits agricoles (maïs, soja, viande, oranges). Les grandes exploitations de l’agrobusiness accaparent les terres alors que les petits paysans ont du mal à survivre. Le pays doit faire face à la déforestation de l’Amazonie qui lui donne une image négative dans le monde ;
- s’est appuyé, dans le secteur manufacturier, sur l’industrie automobile, qui est l’une des principales activités économiques du pays. São Paulo est le berceau de l’industrie automobile brésilienne.
- Pour soutenir ce secteur, le gouvernement de São Paulo a créé un programme qui permet d’investir dans la modernisation et l’augmentation du nombre d’usines et dans le développement de nouveaux modèles. Le Brésil est également un des grands producteurs aéronautiques du monde avec l’entreprise Embraer.
- L’Inde :
- reste un grand pays agricole exportateur. Les espaces productifs industriels se concentrent dans la sidérurgie (Tata steel ou Mittal steel), la construction automobile (Tata motors, Mahindra) ;
- s’est aussi spécialisée dans l’offre de services comme avec les nombreux centres d’appels pour les opérateurs téléphoniques de langue anglaise. À Mumbai, deuxième plus grande ville de l’Inde, cela se traduit par la création d’un nouveau quartier d’affaires (Bandra Kurla) et l’apparition de nouvelles zones industrielles dans les périphéries Nord et Est de la ville ;
- Mumbai abrite également les studios de cinéma mondialement connus de Bollywood ;
- Au Sud de l’Inde, Bangalore est la ville où se trouve le plus important technopôle indien, souvent comparé à la Silicon Valley.
Zone industrielle :
Grande étendue généralement située en périphérie d’une ville et dont l’activité est essentiellement industrielle.
- L’Afrique du Sud est un des rares pays d’Afrique où les investissements étrangers sont sécurisés.
- Par exemple, BMW a implanté une usine automobile à Rosslyn, dans la banlieue de Pretoria.
Comme en Chine, les espaces liés aux services dans les autres pays émergents se concentrent dans les grandes agglomérations (São Paulo, Rio de Janeiro, Mumbai, Dehli). Le Brésil, avec son carnaval de Rio, et l’Inde, avec le Taj Mahal et ses nombreux temples, sont des destinations touristiques mineures (respectivement 6,5 et 15 millions de visiteurs).
Dans les autres pays en développement : de nouveaux espaces productifs
Dans les autres pays en développement : de nouveaux espaces productifs
Des espaces productifs de plus en plus nombreux sur le continent africain
Des espaces productifs de plus en plus nombreux sur le continent africain
Le continent africain a longtemps été en marge de la mondialisation et des grands courants d’échanges. Par conséquent, les espaces productifs y étaient moins présents que sur les autres continents. L’Afrique s’intègre aujourd’hui de plus en plus à la mondialisation et, par conséquent, des espaces productifs s’y développent.
- La fin de nombreuses guerres, une relative et précaire stabilité politique, une population jeune et des ressources abondantes sont autant d’atouts qui permettent au continent africain de davantage prendre part à la mondialisation.
Les espaces productifs agricoles y sont encore très présents et se répartissent entre une agriculture vivrière destinée à la consommation familiale ou une agriculture urbaine. Dans l’agriculture, les espaces productifs concernent principalement les grandes plantations tropicales (cacao, café, thé, etc.) et les cultures spécialisées (comme les fleurs coupées en Éthiopie).
Certaines régions, comme les pays du Maghreb, profitent davantage de ces progrès. Au Maroc, des usines sont construites dans le secteur automobile (Renault, Peugeot) ou aéronautique (Airbus), des ports ultramodernes sont aménagés (comme le port de Tanger-Med).
Les services sont majoritairement implantés dans les capitales ou les grandes villes.
L’Asie du Sud-Est sur le modèle du Japon et des NPIA
L’Asie du Sud-Est sur le modèle du Japon et des NPIA
Le Japon et les NPIA ont entraîné d’autres pays dans leur sillage. La Thaïlande, les Philippines et le Vietnam voient s’installer des filiales de grandes firmes mondiales qui y construisent des unités de production dans les domaines comme le textile, les chaussures et l’électronique.
Le Vietnam, par exemple, achève un cycle de 30 ans de modernisation du pays. Grâce à ses atouts, ce pays a connu un taux de croissance du PIB de 6,8 % en 2017. La même année, la croissance était de 6,7 % pour les Philippines et 3,9 % pour la Thaïlande.
Conclusion :
Les espaces productifs se multiplient et se diversifient. Dans les pays développés, ces espaces se sont retrouvés en crise à cause des délocalisations. En effet, les produits à faible valeur ajoutée sont maintenant sous-traités, ce qui permet aux pays développés de se concentrer sur des activités spécifiques et de développer des pôles de compétitivité. Au niveau des services, ils se concentrent principalement dans les métropoles, ce qui implique la désertification de certains territoires.
Dans les pays émergents comme la Chine, la situation est semblable : le pays a rattrapé son retard et délocalise à son tour dans les pays où la main-d’œuvre est moins chère. Que ce soit en Chine, en Inde, au Brésil, en Afrique du Sud ou dans les autres pays en développement, on assiste là aussi à une concentration des services dans les grandes villes.