Organisation des espaces productifs et accroissement des flux
Introduction :
Les espaces productifs sont répartis dans le monde entier, et génèrent de nombreux échanges. Cette répartition peut amener à traiter la question suivante : en quoi la répartition géographie des espaces productifs génère-t-elle des flux toujours plus importants ?
Nous traiterons pour cela de la nouvelle organisation géographique des espaces productifs, puis de l’importance toujours croissante des flux d’échanges. Enfin, nous verrons que les espaces de production et leurs acteurs sont de plus en plus diversifiés, grâce à l’économie numérique.
Une nouvelle organisation géographique des espaces productifs
Une nouvelle organisation géographique des espaces productifs
Les entreprises multinationales et la répartition géographique des fonctions
Les entreprises multinationales et la répartition géographique des fonctions
Il existe plus de 100 000 entreprises multinationales dans le monde qui s’appuient sur un réseau international de production constitué de plus de 900 000 filiales. Ces entreprises adoptent des stratégies de répartition géographique des étapes de la production afin d’exploiter, à différentes échelles, les avantages comparatifs des différents pays comme une main-d’œuvre peu coûteuse, des matières premières faciles d’accès ou un marché de consommation potentiel, des avantages fiscaux, etc.
Avantage comparatif :
Avantage pour une entreprise ou un pays pouvant être de différentes natures (coût de la main-d’œuvre plus faible, accès à des matières premières, situation par rapport à un marché de consommation, etc.) et qui lui amène une meilleure productivité dans un secteur d’activité donné, lui donnant un intérêt à se spécialiser dans ce secteur d’activité. Les avantages comparatifs sont issus d’une théorie économique du commerce international, développée par l’économiste britannique David Ricardo (1772 – 1823).
C’est notamment le cas pour les productions agricoles ou agro-alimentaires. Par exemple, les entreprises multinationales américaines comme Dole ou Del Monte Foods (qui produisent jus de fruits et fruits frais) s’approvisionnent dans de multiples pays en fonction des saisons pour avoir un approvisionnement continu au prix le plus bas possible.
Dans le domaine industriel, en internationalisant leur production, ces grandes entreprises jouent un rôle crucial dans le commerce mondial : la conception des produits est souvent maintenue dans le pays d’origine pour valoriser l’image de l’entreprise, alors que l’assemblage final est souvent réalisé dans des pays à faible coût de main-d’œuvre. C’est le cas des géants de la téléphonie mobile comme Samsung ou Apple. La commercialisation s’effectue par voie maritime. Ces différentes étapes des entreprises multinationales (conception, assemblage, commercialisation, etc.) constituent des chaînes de valeur ajoutée, à différentes échelles. À chaque étape ou chaque maillon de la chaîne commerciale, une nouvelle valeur est ajoutée, c’est-à-dire que le produit est valorisé.
Chaîne de valeur ajoutée :
Valeur ajoutée générée à chacune des étapes de l’élaboration d’un bien ou d’un service (de la conception jusqu’au consommateur).
- Aujourd’hui, l’Afrique fournit des matières premières, des minerais, des produits agricoles et des produits énergétiques, mais abrite peu d’industries manufacturières.
- L’Asie de l’Est, par contre, est devenue une région spécialisée dans l’assemblage de nombreux produits de consommation courante : électronique, textile et téléphonie.
- L’Asie du Sud, où la main-d’œuvre est parmi la moins chère du monde, produit essentiellement du textile.
- Dans les pays développés, l’industrie textile a quasiment disparu, hormis la confection de luxe. On y trouve par contre certaines industries à haute valeur ajouté, comme l’aéronautique (exemples : Airbus, Boeing) ou l’industrie pharmaceutique ou automobile.
- Les pays du Moyen Orient se sont longtemps contentés de fournir du pétrole ou du gaz dont leur sous-sol regorge. Aujourd’hui, ils se diversifient dans d’autres domaines comme le tourisme ou le transport aérien (exemples : Qatar Airways ou Emirates).
- Certaines entreprises multinationales du domaine de l’agroalimentaire sont présentes dans la plupart des pays du monde (McDonald’s, Coca Cola, Starbucks).
Les atouts des différents territoires
Les atouts des différents territoires
Chaque territoire possède des atouts qui lui donnent des avantages dans certaines activités productives. Le climat, le relief, la latitude, les ressources, l’existence d’une façade maritime, les compétences de sa main-d’œuvre, tous ces éléments vont déterminer des types d’espaces productifs différents, souvent mis en concurrence les uns par rapport aux autres. Dans ce cadre, les acteurs publics jouent un rôle déterminant pour encourager les implantations d’entreprises.
Le Brésil, avec son territoire immense, est devenu la « ferme du monde ». L’Australie, immense également et peu peuplée, possède de nombreux minerais, ce qui contribue à faire sa richesse.
Ces atouts ne sont pas figés dans le temps. Des ressources peuvent s’épuiser à cause de la surexploitation de l’homme. La France et l’Angleterre possédaient, par exemple, d’importantes ressources en charbon, mais la Révolution industrielle les a toutes épuisées.
Rares sont les pays ne possédant aucun atout. Toutefois, certains cumulent des handicaps. Le Japon est un pays exigu, montagneux où les risques naturels sont très nombreux. Et pourtant, de 1968 à 2010, ce fut la deuxième puissance économique du monde.
- Les compétences d’une population peuvent parfois compenser le manque d’atouts des territoires.
Des flux d’échanges toujours plus importants
Des flux d’échanges toujours plus importants
Flux :
Transfert ou circulation entre plusieurs lieux, de personnes, de marchandises ou d’informations. Les flux se font par un ou plusieurs moyens de communication et utilisent des réseaux.
Des flux matériels
Des flux matériels
Les espaces productifs sont dédiés à la fabrication de biens manufacturés, de biens de consommation, à la production agricole ou de services. Ceux-ci s’échangent ensuite sur l’ensemble de la planète, aucun pays dans le monde n’étant capable de vivre en autarcie. Ce commerce mondial entraîne donc des flux matériels intenses entre tous les espaces de la planète.
80 % des échanges mondiaux de marchandises se font par voie maritime entre les pôles les plus développés : Amérique du Nord, Europe, Asie de l’Est.
Désormais le reste du monde y participe aussi, mais moins activement. Même les pays en développement qui ne disposent pas d’un accès facile à la mer y contribuent. C’est le cas de la République Démocratique du Congo qui possède et exporte de grandes quantités de minerais comme le cuivre, l’or ou encore le colombo-tantalite (coltan) indispensable à la fabrication des smartphones. Ces flux matériels concernent pour l’essentiel des produits manufacturés, des matières premières (minerais divers) et des sources d’énergie (pétrole, charbon).
Des flux immatériels
Des flux immatériels
Les flux matériels sont évidemment les plus connus car ils sont visibles, échangés dans les ports, transportés sur des cargos, des porte-conteneurs géants, des supertankers (pétroliers), etc.
Mais les espaces productifs génèrent également une très grande quantité de flux immatériels : les flux financiers et les flux d’information et de connaissances.
Les flux financiers existent depuis longtemps. Cependant, ils ont été facilités par de nouveaux moyens de communication apparus progressivement tout au long des XIXe et XXe siècles et au début du XXIe siècle : le télégraphe, le téléphone, le fax, Internet. La quantité de flux et leur rapidité de transmission ne cessent de progresser.
À titre d’exemple, en 2001, la norme USB 2.0 permettait une vitesse de transfert de données de 480 Mbps (480 Megabits par seconde). En 2018, la norme USB 3.2 permettait une vitesse de 20 Gbps (20 Gigabits par seconde), c’est-à-dire 40 fois plus rapide.
Les flux financiers entre banques, entreprises, bourses mondiales sont donc grandement facilités car ils sont quasiment instantanés. Une partie de ces flux sont des IDE réalisés, par exemple, par une entreprise multinationale à destination d’une ou plusieurs de ses filiales.
Investissement direct à l’étranger (IDE) :
Investissement réalisé par une grande entreprise lorsqu’elle implante une filiale ou investit dans une société dans un autre pays (prise de parts ou rachat).
Internet a également redynamisé les activités boursières du monde entier, qui peuvent échanger leurs informations en temps réel.
Il en est de même pour les flux d’information (télévision ou radio par satellites, téléphonie mobile, Internet) qui ont profité des progrès de la technologie. Aujourd’hui, avec un smartphone muni d’une connexion Internet, un individu peut effectuer des achats mais aussi regarder des films ou écouter de la musique en streaming et téléphoner, partout sur la planète (à l’exception de rares cas de censure, comme en Chine). Les flux immatériels servent également à échanger des connaissances entre scientifiques, étudiants, universités, centres de recherches par email, visioconférences, etc.
Une diversité accrue des acteurs et des espaces de production grâce à l’économie numérique
Une diversité accrue des acteurs et des espaces de production grâce à l’économie numérique
Les géants du e-commerce
Les géants du e-commerce
La fin des années 1990 et le début des années 2000 voient le développement spectaculaire d’Internet et du commerce en ligne. Une économie efficace et particulièrement bien organisée se met alors progressivement en place.
Des géants de l’e-commerce apparaissent d’abord aux États-Unis comme Ebay ou Amazon.
E-commerce (commerce électronique) :
Échanges payants de biens, de services ou d’informations par l’intermédiaire des réseaux informatiques et notamment d’Internet.
Ebay, entreprise américaine de vente aux enchères en ligne, a été créée en 1995 par un Français (Pierre Omidyar) et génère un chiffre d’affaires de 9,3 milliards d’euros (en 2018). Son siège social est à San José dans la Silicon Valley. Les États-Unis constituent son marché principal mais la firme est connue dans le monde entier car elle est implantée dans 28 pays.
Amazon est l’autre géant mondial de l’e-commerce. Également créée en 1995, Amazon a son siège social à Seattle ; l’entreprise occupe la 18e place au classement des 500 plus grandes entreprises mondiales. Amazon emploie 541 000 personnes dans le monde dont 7 500 en France.
D’autres acteurs ont pris une place importante aujourd’hui dans le e-commerce au niveau mondial parmi lesquels le chinois Alibaba, l’Indien Flipkart ou le coréen Coupang.
Les grandes entreprises du commerce traditionnel ont bien compris l’importance du commerce en ligne : toutes ont créé un site dédié permettant au consommateur de réserver ses achats, pouvant ainsi les récupérer dans une plate-forme « drive » ou se faire livrer à domicile.
L’économie numérique, génératrice de flux importants
L’économie numérique, génératrice de flux importants
Partout dans le monde, Internet a permis l’émergence de sociétés spécialisées dans la vente en ligne. Même les plus petites entreprises peuvent avoir un site et pratiquer la vente directe en ligne. Beaucoup de petits vendeurs préfèrent toutefois passer par l’intermédiaire des géants de l’e-commerce et leur paient une redevance.
Les particuliers profitent également du système via les sites d’annonces en ligne. En France, Leboncoin est l’un des sites les plus utilisés. Des équivalents existent partout dans le monde : Gumtree en Angleterre, Craigslist aux États-Unis, etc.
Le commerce électronique accentue les flux car il permet aux acheteurs loin des grands centres de consommation (villes, centres commerciaux) de réaliser toutes sortes d’achats qu’ils n’auraient pas pu effectuer dans le cadre du commerce traditionnel (à cause de l’éloignement). Il stimule la fabrication dans les espaces productifs ainsi que la création d’emplois (centres de stockage et d’envoi des marchandises). Ces activités sont rendues possibles par les nombreuses compagnies comme UPS, Fedex ou DHL qui assurent le transport et la livraison de ces produits, dans le monde entier, en plus des services postaux classiques redynamisés par l’économie numérique. Tout ceci concourt à la mise en place d’un système productif d’un genre nouveau reposant sur un moyen de communication : Internet.
Système productif :
Ensemble des activités économiques, des acteurs et des facteurs qui conduisent à la création, l’échange et la consommation de richesses.
Conclusion :
Les nombreuses entreprises multinationales s’appuient sur un réseau international de production. Leurs fonctions sont dispersées dans le monde suivant des stratégies de répartition géographique des étapes de production. Chaque territoire possédant différents atouts, les espaces productifs sont organisés en fonction de ces derniers.
La répartition géographique de ces espaces, ainsi que l’économie numérique engendrent donc des flux matériels ou immatériels toujours plus importants. De plus, grâce à l’économie numérique, les acteurs et les espaces de production sont de plus en plus diversifiés.