L’Union européenne et la démocratie : fonctionnement et remises en question

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Introduction :

La politique d’élargissement de l’Union européenne est régie par l’article 49 du traité sur l’Union européenne : « Tout État européen […] peut demander à devenir membre de l’Union, à condition de respecter ses principes énoncés à l’article 2 : dignité humaine, liberté, démocratie, respect des droits de l’homme, des libertés fondamentales et de l’État de droit. »
Avant de pouvoir entrer dans l’Union européenne, tout pays candidat doit donc être pourvu d’un régime démocratique stable et d’institutions basées sur la primauté du droit et le respect des droits de l’homme.
Pourtant, la démocratie libérale européenne est critiquée, débattue, remise en question.

L’Union européenne propose-t-elle une forme de démocratie pouvant satisfaire les citoyens européens ?
Après avoir étudié les institutions européennes, nous verrons à quelles difficultés fait face la démocratie au sein de l’Union Européenne.

Un fonctionnement institutionnel original

Les principales institutions européennes

Les principales institutions européennes sont au nombre de 6 :

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On pourrait ajouter la Banque centrale européenne, qui est située à Francfort, mais cette institution n’intervient que sur les questions monétaires… même si ces dernières sont parfois lourdes de conséquences politiques.

Le triangle institutionnel est composé des trois institutions qui permettent de définir les politiques européennes : la Commission européenne, le Conseil de l’Union européenne et le Parlement européen.

La séparation des pouvoirs est complexe et la classification traditionnelle entre pouvoir exécutif, législatif et judiciaire n’est pas nette.

Un cas unique au monde de construction supra-étatique

L’originalité du fonctionnement institutionnel repose sur le fait que l’Union européenne n’est pas un État mais une union d’États avec un degré relativement important d’intégration politique.
Il existe donc un partage de souveraineté qui entraîne nécessairement une répartition des compétences à deux échelles : l’échelle de l’Union et l’échelle de chaque État membre.
L’Union européenne fonctionne avec 3 niveaux de compétences :

  • des compétences exclusives (qui sont exercées par l’Union européenne seule, et non par les États) qui concernent essentiellement le commerce (exemple : politique douanière) et la politique monétaire ;
  • des compétences partagées (qui sont exercées conjointement par l’union européenne et les États) dans de nombreux domaines comme l’environnement, l’agriculture et les transports ;
  • des compétences d’appui, pour lesquelles les États légifèrent seuls, mais l’UE peut apporter son aide, comme la santé publique, la culture et l’éducation.
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À retenir

Le fonctionnement de l’UE est donc unique en son genre puisqu’il ne s’agit pas d’un État, mais pas non plus d’un modèle de démocratie fédérale classique comme aux États-Unis ou en Allemagne. On pourrait dire qu’il s’agit d’un système intermédiaire entre l’État unitaire et le fédéralisme.

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Rappel

  • Un État unitaire est pleinement souverain dans l’exercice de ses pouvoirs sur l’ensemble de son territoire. Les entités territoriales qui le composent n’ont pas d’autonomie à proprement parler.
    Exemple : la France est un État unitaire décentralisé (avec un niveau administratif local), l’Espagne est un État unitaire régionalisé (avec certaines compétences propres aux régions mais sous contrôle de l’État).
  • Un État fédéral partage l’exercice de la souveraineté avec les entités territoriales qui le composent, et qui constituent les États fédérés. Chacun de ces États fédérés dispose de pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire exercés à son échelle, et qui s’articulent avec ceux de l’État fédéral.
    Exemple : les États-Unis et l’Allemagne sont des démocraties fédérales.

Ce partage des pouvoirs entre États et représentants d’une organisation internationale est unique au monde : des États souverains ont fait le choix de confier certaines de leurs prérogatives à une organisation internationale. Cela permet une meilleure gouvernance à l’échelle régionale puisque que les décisions prises par les diverses institutions de l’Union européenne s’imposent à tous les États membres. Le revers de la médaille, c’est que la représentation nationale de chaque pays (parlement, élus, exécutifs nationaux), qui compose théoriquement le ciment de la légitimité démocratique, voit son pouvoir de décision limité et contraint par une organisation sur laquelle les citoyens n’ont que peu d’influence.

En fait, l’Europe a été construite par les États qui ont longtemps laissé les populations à l’écart de ce processus. La prise en compte des citoyens de l’union européenne ne commence qu’en 1979, avec la première élection du Parlement européen au suffrage universel. Pour un certain nombre d’observateurs, c’est encore trop peu : le parlement européen n’a un pouvoir de décision que très limité, contrairement à la commission européenne, dont les membres ne sont pas élus par les citoyens.

Le Parlement au cœur de la démocratie européenne

Le Parlement européen est composé de 705 députés élus au suffrage universel direct.
Le nombre de députés varie en fonction de la population. Plus le pays est peuplé, plus le nombre de députés est important. Ainsi l’Allemagne, pays le plus peuplé de l’Union européenne a 96 sièges. Malte, le pays le moins peuplé, a 6 sièges.

L’hémicycle de Parlement européen à Strasbourg lors d’une séance plénière L’hémicycle de Parlement européen à Strasbourg lors d’une séance plénière. L’hémicycle accueille 12 sessions plénières par an. ©Diliff (CC BY-SA 3.0)

Le Parlement européen accueille 7 groupes politiques avec 3 groupes dominants.

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  • Le PPE est le plus grand groupe siégeant au Parlement européen avec 179 députés en 2022.
  • Le groupe S&D est le deuxième groupe avec 146 députés en 2022.
  • Le groupe RE est au troisième rang avec 98 députés en 2022, mais il joue un rôle important : dans la mesure où les deux premiers partis ne détiennent pas la majorité absolue en se réunissant, ils peuvent avoir besoin du soutien de cette troisième force.

La pluralité des partis politiques représentés au Parlement européen et la dimension transnationale des groupes politiques semblent refléter un critère fondamental de la démocratie libérale : le pluralisme politique. Mais qu’en est-il de la représentation populaire ?

La place des citoyens dans la démocratie européenne

Un taux d’abstention important

La participation moyenne aux élections du Parlement européen n’a jamais été particulièrement haute, bien que les taux soient très variables d’un pays à l’autre. Son score le plus important est celui de 1979, date des premières élections au suffrage universel direct :

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  • La baisse de la participation électorale globale est plutôt constante, malgré une remontée en 2019.

Cette abstention assez importante s’explique par plusieurs facteurs.
Il faut tout d’abord souligner que l’abstention est souvent plus élevée sur les élections qui relèvent d’une échelle supranationale, tout simplement parce qu’il s’agit a priori d’une échelle moins proche des citoyens que les échelles nationale et locale.
Cette potentielle distance entre le citoyen européen et les institutions de l’Union européenne est par ailleurs renforcée par la complexité du fonctionnement de ces institutions (on parle de « technocratie européenne »), qui ne ressemble pas aux fonctionnements nationaux et qui n’est donc pas toujours maîtrisé par les citoyens. Or, pour exprimer un choix éclairé, le citoyen a besoin de se sentir en capacité de le faire, ce que la méconnaissance du système peut parfois empêcher.
La crise de la représentativité qui touche l’échelle nationale n’épargne pas non plus le niveau européen. Ce contexte politique généralisé de baisse de la confiance accordée aux institutions et aux élus se ressent donc aussi, et même d’autant plus, sur le positionnement des citoyens dans l’exercice de leurs droits politiques à l’échelle européenne.

L’euroscepticisme

La participation aux élections du Parlement européen, de 1979 à 2019, évolue de manière à laisser entendre la voix des eurosceptiques.

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Définition

Euroscepticisme :

L’euroscepticisme est l’opposition des partis ou des individus hostiles à l’Union européenne. Cette attitude consiste à refuser toute forme d’intégration supranationale européenne.
Les eurosceptiques sont souverainistes et donc en faveur d’États-nations forts.

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Attention

On distingue généralement les eurosceptiques (qui rejettent le processus d’intégration européenne dans son ensemble) des pro-européens (qui soutiennent le modèle actuel de construction européenne) et des eurocritiques (qui souhaitent un modèle de construction européenne différent).
Les eurocritiques reconnaissent les apports de l’Union européenne. Ils ne remettent pas en question l’existence de l’Union européenne, mais critiquent son fonctionnement, notamment les politiques européennes d’inspiration néolibérale aux dépens d’une Europe sociale et environnementale.

La participation aux élections du Parlement européen, de 1979 à 2019, montre une progression de la voix des eurosceptiques.

En mai 2019, le taux de participation aux élections du parlement est le plus élevé en 20 ans avec 51 % de participation dans l’UE. Ce taux de participation en hausse s’explique de différentes manières. On peut notamment mentionner l’augmentation du vote des jeunes générations de la tranche d’âge 18-39 ans qui veulent notamment faire entendre leurs préoccupations sur l’environnement et le changement climatique et sur plusieurs sujets économiques et sociaux. Mais cela s’explique aussi en partie par une hausse des voix des eurosceptiques : RN en France, 23,4 % – Ligue de Matteo Salvini en Italie, 33,6 % – parti du Brexit de Farage au RU, 31,7 % – parti souverainiste de Victor Orban en Hongrie, 56 %. Tous ces partis composent le groupe ID d’extrême-droite.

Le 23 juin 2016, lors d’un référendum sur l’appartenance du Royaume-Uni à l’Union européenne organisé par David Cameron, Premier ministre britannique, 51,9 % des Britanniques ont choisi de quitter l’UE. La participation a été supérieure à 72 %, un record pour le pays. Ce referendum qui a vu le « oui » à une sortie de l’Union européenne l’emporter a nourri les discours des partis eurosceptiques dans toute l’Europe. Le référendum a conduit au retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne le 31 janvier 2020. On peut dire que le BREXIT est une source d’inspiration pour d’autres partis nationalistes en Europe.

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Définition

BREXIT :

Le BREXIT est une abréviation de “British Exit”, évoquant la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne.
La thèse opposée est désignée par le terme BREMAIN (pour la contraction de “Britain” et de “remain”, à savoir « rester. »

La présence de détracteurs de l’UE au sein même de ses institutions constitue-t-elle un signe de crise du modèle européen ou témoigne-t-elle du bon fonctionnement de la démocratie pluraliste en Europe ?
Ce qui est sûr, c’est que la légitimité des institutions européennes est effectivement souvent contestée.

Le déficit démocratique et la faiblesse du sentiment européen

L’idée d’un déficit démocratique concernant l’Union européenne n’est pas nouvelle. Elle a en effet été formulée dès 1979.

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Définition

Déficit démocratique :

Le déficit démocratique est une expression utilisée pour dénoncer le manque de légitimité démocratique des institutions européennes.

Des efforts été faits pour permettre une meilleure représentation des citoyens, notamment avec l’élection du Parlement au suffrage universel en 1979, puis en octroyant progressivement plus de pouvoir au Parlement, afin que celui-ci soit davantage intégré au processus décisionnel.
Malgré tout, cela ne semble pas suffisant pour combler le sentiment de représentation des citoyens. À ce sujet, on peut remarquer trois choses :

  • le seul véritable contact des citoyens avec leurs représentants européens a lieu tous les 5 ans, lors des élections du Parlement ;
  • les citoyens électeurs votent pour des candidats de partis nationaux, qui font souvent campagne sur des thèmes nationaux, et qui se fondent ensuite dans des coalitions de partis plus larges et souples au Parlement européen. La sensibilité du citoyen votant peut donc ne pas toujours être exactement représentée telle qu’il l’a exprimée lors du vote ;
  • dans la finalité, le pouvoir de la représentation populaire européenne reste relativement limité, dans le sens où les décisions sont surtout prises au niveau des États membres ou de la Commission européenne.

Autre critique formulée à l’égard du fonctionnement démocratique de l’Union européenne : une tendance à fonctionner comme une technocratie.

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Définition

Technocratie :

Terme péjoratif servant à décrire un système politique caractérisé par la tyrannie des experts. Seuls les techniciens, c’est-à-dire les spécialistes, prennent les décisions à la place des citoyens. Il s’agit donc d’une dérive de la démocratie.

Les détracteurs de l’Europe pensent que celle-ci est gérée par des technocrates, des experts, qui sont très éloignés des préoccupations des citoyens. D’après eux, seuls les experts comprennent fondamentalement les règles complexes de l’UE, les perpétuent, et même les établissent. Ils déplorent que les citoyens ne choisissent pas directement, à l’exception du Parlement, les membres des différentes institutions.

De plus, l’Europe politique souffre de l’absence d’un véritable « sentiment européen ». Dans les sondages, le sentiment européen reste faible par rapport au sentiment national. Pourtant, l’Europe est une construction historique et philosophique qui peut faire naître un sentiment européen.
Historiquement, la construction européenne a permis d’accompagner et de consolider la paix au sein de l’Union, de réconcilier la France et l’Allemagne via des intérêts commerciaux communs, et de reconstruire l’Europe après la Seconde Guerre mondiale. L’idée fondamentale de la construction européenne est de créer des intérêts communs (notamment commerciaux) parmi les nations européennes pour inciter au règlement pacifique des différends.

Philosophiquement, les citoyens sont majoritairement attachés à l’État de droit, à des valeurs démocratiques fondamentales de liberté et d’égalité, ils ont une culture politique commune. Ces éléments pourraient laisser supposer qu’un contrat social européen est possible, mais celui-ci reste difficile à définir.
Pour permettre à ces idéaux de s’exprimer et renforcer la démocratie directe, il existe un mécanisme : l’Initiative citoyenne européenne.

L’Initiative citoyenne européenne (ICE)

L’ICE a été définie par le traité de Lisbonne et lancée en 2012.
C’est un instrument de démocratie participative. Elle peut être un moyen de réduire le déficit démocratique de l’UE.
Il s’agit de lancer une pétition pour proposer un projet de loi à la Commission européenne. Les étapes du processus sont les suivantes :

  • Il faut au moins être 7 citoyens de l’UE en âge de voter et résidant dans 7 États membres différents à envoyer une description détaillée de l’initiative à la Commission.
  • La Commission peut décider d’enregistrer l’initiative si elle est conforme aux valeurs de l’Union européenne. Par exemple, l’initiative ne peut pas porter sur le rétablissement de la peine de mort qui est contraire aux valeurs de l’Union.
  • À la suite de l’enregistrement, les organisateurs lancent la pétition qui doit réunir un million de signatures de citoyens européens en une année provenant au moins de 7 pays différents.
  • La Commission peut décider d’adopter l’ICE et de la présenter au Parlement européen et au Conseil de l’UE pour la transformer en loi, en résolution ou en directive.

Affiche promouvant une ICE sur le revenu de base dans les rues de Luxembourg en 2013 Affiche promouvant une ICE sur le revenu de base (ou revenu universel) dans les rues de Luxembourg en 2013

L’ICE pourrait donc être envisagé comme une première étape forte vers la création et le renforcement d’un espace public et politique européen en dehors du calendrier électoral, pour favoriser l’expression citoyenne, le débat et le l’échange d’idées. Mais dans la pratique, le processus a peu de chances d’aboutir.
Parmi les milliers de demandes d’ICE reçues par la Commission, seules 78 initiatives ont été enregistrées depuis 2012 et seules 5 sont allées à leur terme, mais à ce jour aucune n’a fait l’objet d’une loi. La Commission Européenne, pour rappel, n’est pas élue, mais dispose du pouvoir d’écarter des initiatives issues directement de réseaux de citoyens européens. Cela révèle une difficulté à traduire dans les faits la prise en considération des attentes citoyennes, ce qui renforce le sentiment de ne pas être entendu. D’autant que le délai d’obtention des 1 million de signatures est assez court pour avoir un bon déploiement à l’échelle de l’UE, ce qui ne permet pas de sélectionner un grand nombre d’initiatives.

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Exemple

Prenons l’exemple de l’ICE « Right2Water – Pour un droit à l’eau et à l’assainissement » (lancée en 2012), qui a été adoptée par le Parlement et le Conseil. En réalité, la proposition a été adoptée dans une version très diluée par rapport à la requête initiale des citoyens signataires. Ceux-ci demandaient notamment une reconnaissance d’un droit humain à l’eau, qui n’a pas été retenue.
Plus récemment, l’ICE « Interdire le glyphosate et protéger la population et l’environnement contre les pesticides toxiques » (lancée en 2017) a fait l’objet d’une forte mobilisation citoyenne. Mais le bilan est plus que mitigé, puisque l’autorisation du glyphosate a été reconduite, bien que la Commission se soit engagée sur davantage de transparence au niveau des évaluations scientifiques des pesticides.

Conclusion :

Cet outil de démocratie participative qu’est l’ICE manque de visibilité (peu de communication à son sujet) et peine à jouer complètement son rôle. S’il gagnerait à être connu des citoyens des États membres pour leur permettre d’être davantage acteurs de la démocratie européenne, on peut se demander si cet outil est de nature à rééquilibrer le déficit démocratique structurel des institutions européennes.
La place des citoyens dans la démocratie européenne nécessite ainsi des constructions nouvelles.
En effet, l’Union européenne apparaît comme un laboratoire d’expérimentation pour la démocratie où chaque citoyen doit pouvoir trouver sa place.