Développement et inégalités en Chine
Introduction :
La croissance économique chinoise n’a pas d’équivalent depuis son ouverture au monde en 1978. Avec l’arrivée de Deng Xiaoping au pouvoir, la Chine s’ouvre sur le capitalisme, et cela marque le début d’une nouvelle ère.
Mais en quoi le développement rapide de la Chine est-il à l’origine de déséquilibres sociaux et territoriaux ? Pour répondre à cette question, nous verrons tout d’abord que la Chine s’est développée rapidement, mais que cette croissance économique a entraîné de nombreuses inégalités entre les zones rurales et urbaines. Enfin, nous étudierons la quête d’un développement plus harmonieux, souhaitant réduire les fractures socio-spatiales.
La Chine, un territoire à la vitesse de développement inégalée
La Chine, un territoire à la vitesse de développement inégalée
Une croissance économique rapide mais mal répartie
Une croissance économique rapide mais mal répartie
De 1978 à 1989, Deng Xiaoping est le principal dirigeant de la République populaire de Chine. Il a impulsé de nombreuses réformes, telles que les Quatre Modernisations et la littoralisation des espaces productifs, avec la création des ZES.
Quatre Modernisations :
Programme de réformes lancées par Deng Xiaoping en 1978 et concernant l’agriculture, l’industrie, les sciences et technologies et la défense.
- Ces réformes ont mené vers l’« économie socialiste de marché ».
Économie socialiste de marché :
Système économique chinois mis en place à la suite des réformes des années 1970-1980, qui allie libéralisme économique et contrôle politique autoritaire.
La croissance annuelle connaît un ralentissement depuis 2012, ne dépassant plus les 8 % (6,6 % en 2018), alors qu’elle était proche des 10 % entre 1979 et 2011.
La Chine est désormais la deuxième puissance économique mondiale juste derrière les États-Unis, qu’elle devrait dépasser vers 2025.
Les campagnes chinoises, éloignées des pôles urbains dynamiques, sont passées à côté de ce boom économique : la planification de l’économie a largement privilégié les provinces littorales et les métropoles.
- La croissance a été favorisée au détriment de l’équilibre du territoire. Les autorités estimaient que le développement économique se diffuserait progressivement vers les régions intérieures.
Un développement qui profite à la population
Un développement qui profite à la population
- Ce développement spectaculaire profite pourtant bien à la population : selon la Banque mondiale, alors que la Chine comptait 17,2 % de pauvres en 2010, ce chiffre n’atteignait que 3 % en 2017.
- Au total, depuis 1978, la Chine a réussi à sortir plus de 700 millions de personnes de la pauvreté.
- En 2018, elle comptait 373 milliardaires, ce qui la place au second rang dans ce domaine derrière les États-Unis.
- Les revenus de la population chinoise ont ainsi connu une croissance fulgurante atteignant + 1 800 % pour 1 % des Chinois les plus riches en 35 ans.
L’explosion des inégalités internes
L’explosion des inégalités internes
Des inégalités entre zones rurales et urbaines
Des inégalités entre zones rurales et urbaines
En Chine, les inégalités sociales liées à la croissance restent à un niveau élevé, selon les chiffres officiels. En 2017, le coefficient de Gini s’est établi à 0,47 (contre 0,28 pour la France), indiquant la persistance de fortes inégalités.
Coefficient (ou indice) de Gini :
Indicateur représentant les inégalités de salaires (de revenus, de niveaux de vie, etc.). Il varie entre 0 et 1. Plus l’indice est élevé, plus les inégalités sont fortes.
L’extrême pauvreté (habitants vivant avec moins de 1,25 dollar par jour) se concentre dans les provinces rurales de l’Ouest. Si elle a beaucoup reculé, 500 millions de Chinois – soit 40 % de la population – vivent aujourd’hui avec moins de 5 dollars par jour, selon la Banque mondiale.
La fracture entre les villes et les campagnes est importante.
Le revenu annuel net des habitants ruraux était quasiment trois fois inférieur à celui des urbains en 2017 : 13 432 yuans (environ 1 735 euros) par personne contre 36 396 (environ 4 700 euros).
On observe des migrations intérieures vers le littoral et un exode rural important malgré le contrôle des autorités, et ce pour plusieurs raisons :
- la différence de traitement entre les ruraux et les urbains : ces derniers bénéficient de plus de logements sociaux et d’une couverture sociale plus étendue (notamment un système de retraite) ;
- l’extrême morcellement des exploitations agricoles dans un contexte de fortes densités de population comme au Sichuan (province du Sud-Ouest de la Chine) ;
- les risques récurrents d’inondations dans la vallée du Yangzi ;
- la difficulté de mise en valeur agricole dans les régions montagneuses ou désertiques de l’Ouest.
- L’urbanisation est donc massive dans les territoires littoraux.
Des inégalités à d’autres échelles
Des inégalités à d’autres échelles
Ces inégalités sont encore plus marquées dans les territoires profitant pleinement du développement économique et notamment les métropoles comme à Shanghai.
Les inégalités d’accès à l’éducation ou à la santé sont aussi très marquées entre les régions les plus développées et celles qui demeurent en marge du développement. L’espérance de vie est supérieure à 80 ans dans 5 régions (Hong Kong, Macao, Shanghai, Beijing et Tianjin) mais autour des 70 ans seulement au Tibet.
À cela s’ajoutent des tensions ethniques entre les Hans majoritaires en Chine et des minorités comme les Ouïgours (dans la région autonome du Xinjiang) ou les Tibétains, qui se retrouvent régulièrement privés de leurs terres (distribuées à des populations Hans) et qui restent donc en marge du développement économique.
Réduire les fractures socio-spatiales : la Chine en quête d’un développement harmonieux
Réduire les fractures socio-spatiales : la Chine en quête d’un développement harmonieux
Des politiques de rééquilibrage
Des politiques de rééquilibrage
Conscientes que ces inégalités engendrent une fragmentation de leur territoire, les autorités chinoises tentent d’y remédier par des politiques de rééquilibrage.
La politique de développement de l’Ouest de la Chine (« Go West » policy) ainsi que le projet des nouvelles routes de la soie, lancé en 2013, ont pour objectif de dynamiser les provinces de l’Ouest et du Sud-Ouest, majoritairement rurales.
Signe d’un début de rééquilibrage, les revenus des résidents des zones rurales progressent plus rapidement que ceux des urbains (+ 6,2 % en campagne contre + 5,6 % en ville en 2016).
L’État chinois a aussi mis en place des mesures fiscales et sociales pour réduire les inégalités entre populations.
- Ainsi, la suppression d’impôts agricoles nationaux ou la gratuité de l’éducation pour les enfants des campagnes de l’Ouest chinois visent à rééquilibrer la société chinoise mais surtout à freiner, voire à stopper, l’exode rural.
Des inégalités difficiles à résorber
Des inégalités difficiles à résorber
Les conditions de vie de la population rurale restent cependant beaucoup plus difficiles que celles des urbains : le niveau des salaires est bas, la couverture sociale très faible. L’hôpital est inaccessible à 75 % de la population rurale.
- Cette situation n’incite pas les mingongs à revenir à la terre.
Mingong :
Travailleur migrant, souvent classifié en tant que rural, qui migre parfois illégalement dans les villes dans l’espoir d’y trouver de meilleures conditions de vie.
De plus, les populations vivant à la périphérie des métropoles sont régulièrement privées de leurs terres, au profit d’investisseurs chinois ou étrangers souhaitant implanter usines, entrepôts, lotissements résidentiels de luxe ou parcours de golf.
- Leur niveau de vie ne leur permet pas d’utiliser la corruption, très présente en Chine, pour se protéger.
Enfin, dans le cadre d’une mondialisation reposant avant tout sur la maritimisation des échanges, les investisseurs semblent toujours plus enclins à porter leurs investissements sur les régions littorales.
Maritimisation :
Processus amenant les littoraux à jouer un rôle de plus en plus important dans l’économie d’un grand nombre de pays.
Conclusion :
La Chine s’est développée rapidement grâce aux nombreuses réformes instaurées par Deng Xiaoping, tant et si bien qu’aujourd’hui, elle est la deuxième puissance mondiale. Pourtant, cette croissance économique a largement profité aux espaces urbains et a exclu les campagnes chinoises.
D’importantes inégalités sont alors apparues entre les zones rurales et urbaines, au niveau des revenus mais aussi de l’accès à l’éducation et à la santé. Bien que le gouvernement souhaite remédier à la fragmentation socio-spatiale et mette en place des mesures adéquates, les inégalités persistent.
La Chine doit encore trouver son équilibre.