Croissance exponentielle et suites géométriques
Introduction :
Dans les cours précédents, nous avons découvert les suites et, plus particulièrement, les suites arithmétiques, qui permettent d’étudier des phénomènes à croissance linéaire.
Nous allons ici définir et étudier les suites géométriques, que nous prolongerons dans le cours suivant avec les fonctions exponentielles. Ces suites et ces fonctions permettent, elles, d’étudier des phénomènes à croissance exponentielle, comme l’évolution d’une population, la transmission d’un virus, les placements ou emprunts à intérêts composés, etc.
Définition et propriétés
Définition et propriétés
Dans une suite arithmétique, pour passer d’un terme au suivant, on ajoute toujours le même nombre.
Dans une suite géométrique, on multiplie toujours par le même nombre pour passer d’un terme au suivant. En considérant que ce nombre et le premier terme de la suite sont tous les deux non nuls (s’ils sont nuls, la suite est identiquement nulle), cela revient à dire que le rapport entre un terme et celui qui le précède reste constant.
Suite géométrique :
Une suite numérique $u$, de premier terme $u(0)$ donné, est dite géométrique lorsqu’il existe un réel $q$ tel que, pour tout entier naturel $n$, $u(n+1)=q\times u(n)$.
- Le nombre $q$ est appelé raison de la suite géométrique.
Si le premier terme et la raison d’une suite géométrique sont strictement positifs, alors tous les termes de la suite sont strictement positifs.
- À notre niveau, on se restreint à ces cas.
Dans une suite géométrique, le taux d’évolution, ou variation relative, entre deux termes consécutifs reste constant. On parle de croissance exponentielle.
Le taux d’évolution $t$ entre $u(n)$ et $u(n+1)$ est égal à :
$$t=\dfrac{u(n+1)-u(n)}{u(n)}$$
La raison $q$ est alors le coefficient multiplicateur entre $u(n)$ et $u(n+1)$, avec $q=1+t$, soit $t=q-1$.
On considère maintenant une suite géométrique $u$, de premier terme $u(0)$ et de raison $q$, et on représente l’évolution entre $u(0)$ et $u(n)$, avec $n$ un entier naturel :
$$u(0)\,\overbrace{\red{\xrightarrow{\times q}}u(1)\red{\xrightarrow{\times q}}u(2)\red{\xrightarrow{\times q}}… \red{\xrightarrow{\times q}}u(n-1)\red{\xrightarrow{\times q}}}^{\green n \text{ fois}}\,u(\green n)$$
Ainsi, pour passer de $u(0)$ à $u(\green n)$, on multiplie $u(0)$ par $\red q^{\green n}$.
Soit $u$ une suite géométrique de premier terme $u(0)$ et de raison $q$.
Pour tout entier naturel $n$, on a la relation fonctionnelle :
$$u(n)=u(0)\times q^n$$
Soit $u$ la suite géométrique de premier terme $\purple{u(0)=3}$ et de raison $\red{q=1,5}$.
- On a alors la relation de récurrence, pour tout entier naturel $n$ : $$u(n+1)=\red q\times u(n)=\red{1,5}\times u(n)$$
- On a ainsi, par exemple :
$$\begin{aligned} \green{u(1)}&=\red q\times \purple{u(0)}=\red {1,5}\times \purple{3}=\green{4,5} \\ \pink{u(2)}&=\red q\times \green{u(1)}=\red {1,5}\times \green{4,5}=\pink{6,75} \end{aligned}$$ - On peut aussi donner la formule explicite, qui exprime le terme général $u(n)$ en fonction de $n$. Ainsi, pour tout entier naturel $n$ :
$$u(n)=\purple{u(0)}\times \red q^n=\purple 3\times \red{1,5}^n$$ - On peut ainsi calculer directement, par exemple, les termes de rangs $12$ et $20$ ( arrondis au centième près) :
$$\begin{aligned} \orange{u(12)}&=\purple 3\times \red{1,5}^{\orange{12}}\approx \orange{389,24} \\ \blue{u(20)}&=\purple 3\times \red{1,5}^{\blue{20}}\approx \blue{9\,975,77} \end{aligned}$$
Soit $v$ la suite géométrique de premier terme $\purple{v(0)=7}$ et de raison $\red{q^{\prime}=0,6}$.
De la même façon que pour la suite $u$, on peut donner la relation de récurrence qui la définit, et la formule explicite.
- Pour tout entier naturel $n$ :
$$\begin{aligned} \textcolor{#A9A9A9}{\text{Récurrence\ :\ }}&v(n+1)=\red{q^{\prime}}\times v(n)=\red{0,6}\times v(n) \\ \textcolor{#A9A9A9}{\text{Explicite\ :\ }}&v(n)=\purple{v(0)}\times \red{q^{\prime}}^n =\purple{7}\times \red{0,6}^n \end{aligned}$$
Une formule explicite peut permettre de reconnaître une suite géométrique, et de donner son premier terme et sa raison.
Par exemple, soit $u$ la suite définie, pour tout entier naturel $n$, par :
$$u(n)=2,3\times 3,7^n$$
On reconnaît une formule du type $u(0)\times q^n$. En effet :
$$u(n)=\overbrace{2,3}^{\footnotesize{\textcolor{#A9A9A9}{u(0)}}}\times {\underbrace{3,7}_{\footnotesize{\textcolor{#A9A9A9}q}}}^n$$
- $u$ est donc une suite géométrique de premier terme $2,3$ et de raison $3,7$.
En règle générale, on a, pour tous entiers naturels $n$ et $p$ :
$$u(n)=u(p)\times q^{n-p}$$
Remarque :
Ainsi, si le premier terme est de rang $1$ (au lieu de $0$), on a :
$$u(n)=u(1)\times q^{n-1}$$
Sens de variation
Sens de variation
[admise]
Soit $u$ une suite géométrique de premier terme $u(0) > 0$ et de raison $q > 0$.
- Si $q > 1$, la suite $u$ est strictement croissante.
- Si $0 < q < 1$, la suite $u$ est strictement décroissante.
- Si $q = 1$, la suite $u$ est constante et égale à son premier terme.
Soit $u$ la suite géométrique de premier terme $u(0)=3$ et de raison $q=1,5$.
On veut représenter la suite $u$ par un nuage de points de coordonnées $\big(n\ ;\, u(n)\big)$ , pour $0 \leq n \leq 10$.
On peut pour cela utiliser un tableur (où les valeurs sont données avec trois décimales).
11 premiers termes de la suite u
- Dans la colonne A, on entre les valeurs de $n$ qui nous intéressent.
- En B2, on entre la valeur de $u(0)$, soit $3$.
- En B3, on peut se servir de la relation de récurrence : pour tout entier naturel $n$, $u(n+1)=1,5\times u(n)$, en entrant donc :
$$=1,5\ ^\ast\ \text{B2}$$ - On peut aussi, en B3, se servir de la formule explicite : pour tout entier naturel $n$, $u(n)=3\times 1,5^n$, et on entre alors :
$$=3\ ^\ast\ 1,5^{\ \wedge}\text{A3}$$ - On utilise ensuite la poignée de recopie pour copier la formule.
Le tableau obtenu, on peut générer le nuage de points correspondant à ces valeurs :
Représentation des 11 premiers termes de la suite u (image temporaire)
Sur cette représentation, on voit que, contrairement à celle d’une suite arithmétique, les points ne sont pas alignés.
On voit aussi que le nuage de points « monte » quand $n$ croît, et la raison $q=1,5$ est strictement supérieure à $1$.
- La suite $u$ est strictement croissante.
Soit $v$ la suite géométrique de premier terme $7$ et de raison $0,6$.
On a représenté ci-dessous les $11$ premiers termes de la suite $v$ :
Représentation des 11 premiers termes de la suite v (image temporaire)
Sur cette représentation, on voit que le nuage de points « descend » quand $n$ croît, et la raison $q^{\prime}=0,6$ est strictement inférieure à $1$.
- La suite $v$ est strictement décroissante.
Racine $n\text{-ième}$ d’un réel positif et taux d’évolution moyen
Racine $n\text{-ième}$ d’un réel positif et taux d’évolution moyen
Soit $u$ la suite géométrique de premier terme $u(0)=2$ et de raison $q$ inconnue. On connaît cependant le terme de rang $6$ : $u(6)=1\,458$.
- On cherche à déterminer la valeur de la raison $q$.
Comme $u$ est par hypothèse une suite géométrique, on a, pour tout entier naturel $n$ :
$$u(n)=u(0)\times q^n$$
Comme on travaille avec des termes strictement positifs (dont le premier), on peut écrire :
$$q^n=\dfrac{u(n)}{u(0)}$$
En particulier, pour $n=6$ :
$$\begin{aligned}
q^6&=\dfrac{u(6)}{u(0)} \\
&=\dfrac {1\,458}2 \\
&=729
\end{aligned}$$
Il faut donc résoudre l’équation $q^6=729$, d’inconnue $q$.
- On définit pour cela la racine $n\text{-ième}$ d’un nombre réel positif.
Racine $n\text{-ième}$ d’un réel positif :
Soit $n$ un entier naturel supérieur ou égal à $2$.
La racine $n\text{-ième}$ d’un réel positif $a$ est l’unique solution positive de l’équation, d’inconnue $x$ :
$$x^n=a$$
Elle est notée : $\sqrt[n]{a}$, ou $a^{\frac 1n}$.
- On utilisera dans ce cours cette seconde notation, avec un exposant rationnel.
La racine carrée d’un réel positif $a$ est l’unique solution positive de l’équation $x^2=a$.
- Ainsi, la racine carrée de $a$ est la racine $2\text{-ième}$ de $a$.
Et $\sqrt a$, simplification de la notation $\sqrt[2]{a}$, se note donc aussi : $a^{\frac 12}$.
On revient à l’équation $q^6=729$.
La solution positive de cette équation est donc la racine $6\text{-ième}$ de $729$ :
$$q=729^{\frac 16}$$
Pour calculer cette valeur, on utilise la calculatrice, avec donc un exposant rationnel.
On entre, dans la calculatrice :
Remarque : On ne met pas ici de parenthèses autour de l’exposant, car, sur la plupart des calculatrices de lycée, l’appui sur passe en affichage exposant. Si ce n’est pas le cas sur votre calculatrice, n’oubliez pas d’ajouter ces parenthèses.
- On obtient ainsi : $q=3$.
En toute rigueur, l’équation $q^6=729$, où l’exposant est pair, admet deux solutions opposées : $729^{\frac 16}=3$ et $-729^{\frac 16}=-3$.
Mais on s’est restreint aux cas où la raison est strictement positive : $-3$ ne convient donc pas ici.
On considère une quantité qui subit $n$ évolutions successives, pour un taux d’évolution global noté $t_\text{g}$.
Le taux moyen $t_\text{m}$ par évolution est égal à :
$$t_\text{m}=(1+t_\text{g})^{\frac 1n}-1$$
En notant $\text{CM}_\text{g}$ le coefficient multiplicateur global, on a aussi :
$$t_\text{m}=(\text{CM}_\text{g})^{\frac 1n}-1$$
Pour bien comprendre cette propriété, on représente ci-dessous les $n$ évolutions successives avec $V_0$ la valeur initiale de la grandeur, $V_1$ la valeur après $1$ évolution, $V_2$ la valeur après $2$ évolutions, jusqu’à $V_n$ la valeur après $n$ évolutions :
Représentation des $n$ évolutions successives (image temporaire)
D’où :
$$\begin{aligned}
(1+t_\text{m})^n&=1+t_\text{g} \\
1+t_\text{m}&=(1+t_\text{g})^{\frac 1n} \\
t_\text{m}&=(1+t_\text{g})^{\frac 1n}-1
\end{aligned}$$
En $n=30$ ans, la population de la métropole toulousaine a augmenté de $57\,\%$, ce qui correspond à un taux global d’évolution $t_\text{g}=0,57$.
Le taux d’évolution annuel moyen $t_\text{m}$ vaut alors :
$$\begin{aligned}
t_\text{m}&=(1+t_\text{g})^{\frac 1n}-1 \\
&=(1+0,57)^{\frac 1{30}}-1 \\
&=(1,57)^{\frac 1{30}}-1 \\
&\approx 0,01515
\end{aligned}$$
- L’augmentation en $30$ ans de $57\,\%$ correspond à une augmentation annuelle moyenne d’environ $1,515\,\%$.