Aménagement et développement des espaces ruraux français
Introduction :
En 2017, 19,8 % de la population totale française était rurale. Année après année, ce pourcentage ne cesse de diminuer. L’urbanisation impacte les espaces ruraux, qui sont de moins en moins nombreux.
Dans ce cours, nous nous intéresserons aux différents enjeux du développement rural en France. Ainsi, nous verrons tout d’abord les problématiques liées à l’agriculture et aux services publics. Ensuite, nous étudierons le rôle des acteurs publics dans le développement rural. Enfin, nous nous pencherons sur les défis auxquels sont confrontés les espaces ruraux français.
Les enjeux du développement des espaces ruraux
Les enjeux du développement des espaces ruraux
Valorisation et soutien de l’agriculture
Valorisation et soutien de l’agriculture
L’agriculture française est confrontée à différentes crises :
- diminution du nombre d’exploitants ;
- multiplication des liquidations judiciaires dans certains secteurs agricoles ;
- concurrence mondiale et volatilité (variation) des prix ;
- scandales sanitaires et environnementaux.
Dans ce contexte, l’Union européenne (par l’intermédiaire de la PAC) et le gouvernement français (grâce au budget du ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation) accordent des financements dédiés à trois priorités.
Le soutien à l’agriculture est la première : il est basé sur des aides aux régions en situation de handicaps naturels (zones de montagne et zones défavorisées) et sur des mesures agroenvironnementales, avec notamment 81 millions d’euros – dont la moitié en soutien à l’agriculture biologique.
Les jeunes agriculteurs sont également soutenus dans la mesure où un départ d’agriculteur sur deux n’est actuellement pas remplacé.
Les espaces ruraux ultramarins ne sont pas oubliés avec le soutien à la filière sucrière en Guadeloupe, en Martinique et à la Réunion, avec 124,4 millions d’euros en 2018.
La deuxième priorité concerne la capacité à prévenir et à réagir face aux risques sanitaires agricoles, avec le renforcement de la prévention et de la vigilance dans les domaines de la sécurité sanitaire des aliments, de la santé animale et de la santé végétale. Le budget, en hausse de 12 %, doit permettre d’améliorer les contrôles sanitaires et la surveillance des dangers sanitaires.
Risque sanitaire agricole :
Menace pour la population humaine ou animale liée à l’exposition à une source de contamination d’origine agricole.
La dernière priorité concerne l’enseignement et la formation agricoles. L’objectif est double :
- former plus d'étudiants pour répondre aux besoins des filières, notamment en cadres de haut niveau ;
- et développer la recherche et l’innovation au sein de l’économie de la connaissance.
Économie de la connaissance :
Économie fondée sur la production et les services liés à l’innovation, l’investissement dans le capital humain et la diffusion des savoirs, et appuyée sur les technologies de l’information et de la communication (TIC).
Une offre de services publics à réorganiser et redistribuer
Une offre de services publics à réorganiser et redistribuer
Les espaces ruraux sont confrontés à des problématiques spécifiques concernant l’accès aux services publics et leur couverture par le réseau numérique, ces derniers permettant de lutter contre leur isolement et leur manque d’attractivité.
- La question de l’égalité et l’équité territoriales se pose alors.
L’égalité et l’équité territoriales sont des enjeux majeurs de l’aménagement des territoires en France.
La fermeture des différents services publics fait régulièrement débat, notamment en ce qui concerne l’accès à l’éducation et à la santé. Pour répondre aux besoins des populations, des maisons de services au public (MSAP) ont été créées, chargées d’accompagner les citoyens dans leurs démarches administratives.
Les zones blanches constituent un autre défi. Il s’agit de zones du territoire qui ne sont pas ou très peu desservies par un réseau, qu’il s’agisse de la téléphonie mobile ou d’Internet.
- 541 communes sont encore concernées en 2018.
L’objectif était de faire disparaître les zones blanches à l’horizon 2020. L’une des priorités est de développer la couverture 4G permettant d’accéder à la fois à la téléphonie et à Internet. Un partenariat entre l’État et les opérateurs est mis en place à cet effet. En 2022, si 99 % de la population est couverte par la 4G, il reste encore des zones blanches.
Il s’agit ici d’un enjeu majeur de l’attractivité des espaces ruraux : en effet, face au développement du télétravail, il est nécessaire d’offrir une capacité de connexion suffisante et de qualité aux candidats désirant résider à la campagne tout en gardant leur travail en ville.
Le rôle des acteurs publics dans le développement rural
Le rôle des acteurs publics dans le développement rural
L’État et les collectivités territoriales
L’État et les collectivités territoriales
Afin d’aider les territoires ruraux en difficulté, l’État a mis en place depuis 1995 des zones de revitalisation rurale (ZRR), définies par la faiblesse de la densité de population et des revenus des habitants.
Ces zones bénéficient notamment d’exonérations fiscales (dispense de payer impôts et taxes), accentuant ainsi leur attractivité économique ou résidentielle.
L’État a également créé les contrats de ruralité afin de coordonner les moyens techniques, humains et financiers dans le cadre d’un projet de territoire.
Contrat de ruralité :
Contrat passé entre les acteurs institutionnels, économiques et associatifs d’un territoire rural afin d’assurer son développement, dans une logique de projet de territoire.
L’objectif est d’établir une coopération entre les partenaires institutionnels (collectivités territoriales), économiques et associatifs dans les territoires ruraux afin d’accompagner le développement par des politiques publiques efficaces.
- En 2017, 216 millions d’euros ont été alloués à ces contrats.
L’État et les collectivités territoriales peuvent enfin proposer ou soutenir des aménagements dans les espaces ruraux.
Ils sont parfois contestés comme dans le cas des ZAD (zones à défendre) de Notre-Dame-des-Landes (aéroport de Nantes) ou de Bure dans la Meuse (projet d’enfouissement de déchets nucléaires).
Les parcs naturels nationaux et régionaux peuvent également participer au développement rural mais être contestés.
- C’est le cas du parc naturel de la Vanoise, dont les communes refusent la charte, ou encore du projet de parc national des forêts de Champagne et de Bourgogne qui pourrait freiner les activités économiques.
Le rôle de l’Union européenne
Le rôle de l’Union européenne
L’Union européenne, dans le cadre de la PAC (effective depuis 1962), a historiquement soutenu l’agriculture européenne, notamment française, en subventionnant les agriculteurs et garantissant les prix.
La PAC a été réformée en 2014 et s’appuie désormais sur deux piliers : le soutien aux revenus des agriculteurs et le développement rural.
Dans le cadre de la lutte contre les inégalités territoriales au sein de l’Union européenne, le Fonds européen de développement régional (FEDER) et le Fonds social européen (FSE) mettent en œuvre le Fonds Européen Agricole pour le Développement Rural (FEADER).
Celui-ci a pour mission d’aider les régions rurales à se développer, à augmenter leur taux d’emploi et à améliorer les conditions de vie des ruraux.
Trois objectifs sont fixés :
- améliorer la compétitivité de l’agriculture ;
- garantir la gestion durable des ressources naturelles et des actions liées au climat ;
- permettre le développement territorial équilibré des zones rurales.
Les collectivités territoriales doivent proposer des programmes de développement rural (PDR), dans une logique de projet, afin de bénéficier des financements disponibles.
- Le budget total pour 2014/2020 s’élève à 95,5 milliards d’euros.
Au sein des PDR régionaux français est prévue la signature de contrat de protection de l’environnement, associant de multiples acteurs dans un souci de gestion durable des activités agricoles. De même, dans le cadre de la réforme de la PAC pour 2020 sont prévues des aides spécifiques aux exploitants agricoles pour les services rendus à l’environnement.
Des espaces ruraux au cœur de multiples défis
Des espaces ruraux au cœur de multiples défis
La reconnaissance des spécificités de la ruralité et de ses potentialités
La reconnaissance des spécificités de la ruralité et de ses potentialités
En dépit d’une urbanisation croissante, les espaces ruraux conservent des caractéristiques spécifiques liées aux territoires et sociétés qui les mettent en valeur. Cette identité spécifique est revendiquée face à des discours sur l’urbanisation généralisée des espaces français. L’association des maires ruraux de France milite ainsi pour la reconnaissance et la prise en compte des spécificités du monde rural.
Cette identité, malgré la diversité importante des espaces ruraux, repose notamment sur leur rôle nourricier pour les espaces urbains, leurs paysages, leurs sociabilités et les problématiques liées :
- à la qualité de l’accès aux réseaux de transports et de communication ;
- au maintien des services publics.
La capacité de résilience des espaces ruraux est également mise en avant dans le cadre des enjeux liés au changement global (ensemble des modifications des écosystèmes liées à l’action humaine).
Résilience :
Capacité d’un territoire et de ses habitants à absorber une perturbation, à se réorganiser et à assurer son fonctionnement.
La reterritorialisation des activités dans les espaces ruraux
La reterritorialisation des activités dans les espaces ruraux
Le processus de reterritorialisation de l’agriculture et des autres activités rurales (artisanat, industrie rurale – exemple : les couteaux Laguiole) bénéficie de l’engouement des consommateurs pour les produits de qualité liés aux terroirs.
Reterritorialisation de l’agriculture :
Processus de valorisation des ressources économiques et agricoles locales, basées sur le territoire et les acteurs qui le mettent en valeur.
Les politiques de labellisation de l’Institut national de l’origine et de la qualité (INAO) s’appuient sur cette dynamique afin de valoriser les productions dans le cadre de la multifonctionnalité des espaces ruraux, dans la mesure où la qualité des produits, liée aux savoir-faire territoriaux accentue l’attractivité de ces produits et de leurs territoires, notamment à des fins commerciales et touristiques.
La reterritorialisation s’appuie également sur les logiques de protection de l’environnement et de patrimonialisation des campagnes et de leurs paysages, dans le cadre d’un développement rural durable.
Enfin, elle bénéficie des nouvelles politiques de projet des instances territoriales, à toutes les échelles.
Politique de projet :
Programme de développement des territoires, à différentes échelles, basé sur la définition, par les collectivités territoriales, de projets de développement. Ils sont soumis à une sélection pour disposer des financements demandés.
Conclusion :
Les espaces ruraux rencontrent plusieurs difficultés. D’une part, l’agriculture a besoin d’être valorisée et d’être soutenue financièrement ; d’autre part, les services publics doivent être réorganisés pour que l’aménagement du territoire soit équitable.
Les acteurs publics mettent en place des stratégies pour aider les territoires ruraux en difficulté. Parfois, ils deviennent partenaires, comme en témoigne le FEADER.
Les espaces ruraux sont donc confrontés à de multiples défis : la reconnaissance de leurs spécificités et la reterritorialisation de leurs activités.